10 avril 2025

Jean-Philippe Thibault - jpthibault@medialo.ca

Partager sur les réseaux sociaux

©Gracieuseté

Le préfet du Rocher-Percé, Samuel Parisé.

Le programme RénoRégion aide les propriétaires-occupants à revenu faible qui vivent en milieu rural, afin qu’ils puissent effectuer des travaux pour corriger des défectuosités majeures sur leur résidence. L’enveloppe était d’environ 15 millions de dollars par année. Seuls les moins fortunés pouvaient en profiter, puisque la valeur du bâtiment à réparer ne doit pas dépasser 150 000$.

Son abolition signifie dans Rocher-Percé que ce sont 134 ménages qui vont continuer d’attendre pour calfeutrer des fenêtres qui ne sont pas étanches, qui vont patienter pour colmater une toiture qui coule ou encore remettre à plus tard le changement de leur boîtier électrique désuet.

Le programme est particulièrement populaire dans la MRC, qui a pu profiter d’une part significative de 2,4 millions de dollars dans les deux dernières années, contribuant au maintien à domicile de 140 ménages. Un montant ponctuel de 485 000$ avait aussi été octroyé l’an dernier pour répondre à la demande, faisant grimper la somme à 2,9 millions. Rocher-Percé arrive au 103e rang sur 104 quant à son indice de vitalité économique et en Gaspésie, les ménages sont propriétaires de leur logement dans une proportion de 78,3%, comparativement à 44,6% dans l’ensemble de la province.

« C’est un programme essentiel pour aider les propriétaires occupants les moins bien nantis de nos communautés, soit des personnes âgées ou des familles monoparentales vivant en milieu rural à corriger des défectuosités majeures à leur modeste résidence, explique le préfet du Rocher-Percé, Samuel Parisé. Leur espoir de maintien à domicile risque d’être compromis. »

L’élu déplore avec vigueur la décision de sabrer dans RénoRégion et demande au premier ministre Legault ainsi qu’à sa ministre responsable de l’Habitation, France-Élaine Duranceau, de revenir sur cette décision. L’attachée de presse de la ministre Duranceau a affirmé à La Presse vouloir construire plus de logements sociaux et abordables en région. Quand, où, combien? Aucune réponse précise pour le moment, outre le fait que le programme RénoRégion est suspendu.

« Les gens ne veulent pas aller dans des appartements; ils veulent rester dans leur maison à laquelle ils sont attachés. Je serais aussi curieux de voir le nombre de HLM qui ont vu le jour en Gaspésie en 10 ans, ajoute Samuel Parisé. J’ai 134 ménages qui attendent sur une liste d’attente et je n’ai pas fait de période d’inscription pour cette année. C’est un programme attendu, année après année, qui a un impact considérable sur notre milieu. Le téléphone sonne à tous les jours pour ça. C’est essentiel pour qu’on puisse conserver un parc immobilier décent dans une crise du logement. C’est contradictoire, le fait de vouloir garder les gens dans leur milieu, mais qu’on fait tout pour les en empêcher en coupant un tel programme. Pour nous, chaque logement qui est préservé est une victoire sociale. »

Décrié unanimement

 

Lors de la séance du conseil municipal de lundi, le maire de Chandler a lui aussi critiqué la décision. La Ville demande à Québec de la reconsidérer. « On demande tout le temps aux personnes âgées de rester le plus longtemps chez eux. On a une population vieillissante, mais on coupe là-dessus. C’est inacceptable », lance Gilles Daraîche.

Idem pour le maire de Gaspé, Daniel Côté, qui a lui aussi soulevé ce enjeu lors de la séance du conseil municipal de lundi. Une résolution officielle a été adoptée pour demander le rétablissement du programme RénoRégion. « Ce sont des peccadilles, des grenailles, des économies de bouts de chandelle dans le budget provincial, mais c’est drôlement important pour notre monde », lance-t-il d’emblée. Les 15 millions de dollars sur des dépenses projetées de 165,8 milliards cette année correspondent à 0,0001% du budget provincial. « Ça aide nos aînés à rester à la maison dans un confort minimal. Ça enlève une pression sur la pénurie de logements, sinon ces gens-là si on ne les aide pas vont aller dans des logements sociaux, qui eux sont déjà pleins. »

©depositphotos.com

Seuls les moins fortunés pouvaient en profiter, puisque la valeur du bâtiment à réparer ne doit pas dépasser 150 000$.

L’Union des municipalités du Québec a de son côté qualifié la décision d’incohérente avec les impératifs de la crise du logement actuelle et le climat d’incertitude économique. « Ce sont les populations vivant dans des conditions précaires qui s’en trouveront pénalisées. » À noter que le programme d’adaptation de domicile pour les personnes handicapées ou à mobilité réduite est lui aussi suspendu.