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Retour15 mars 2025
Jean-Philippe Thibault - jpthibault@medialo.ca
Tous les saumons devront être remis à l’eau; Ottawa lance son plan
GASPÉ

©Photo gracieuseté - CGRMP
La possibilité de permettre une certaine rétention de petits saumons sera évaluée à la suite de l'analyse des montaisons à la fin du mois de juillet.
Avec les informations de Emy-Jane Déry. Sans surprise, le ministère de la Faune a dévoilé que tous les saumons pêchés cette année – sauf quelques exceptions sur la Côte-Nord et la Basse-Côte-Nord, notamment – devront être remis à l’eau.
La possibilité de permettre une certaine rétention de petits saumons sera évaluée à la suite de l'analyse des montaisons à la fin du mois de juillet. Cette décision est motivée par les faibles montaisons de petits saumons observées en 2023, et de celles largement en deçà de la moyenne en 2024, autant pour les petits que pour les grands saumons. Québec souligne que les données recueillies incitent à adopter une approche de prudence. Pour ceux qui tenteront leur chance en catch and release, deux saumons pourront toujours être pris chaque jour.
Une industrie inquiète
Un peu plus tôt en mars, la Fédération québécoise pour le saumon atlantique (FQSA) exhortait Ottawa d’agir rapidement alors que les montaisons seront vraisemblablement encore une fois « très en deçà de la normale » en 2025. « Il est essentiel de poser des actions dès ce printemps, afin d’assurer sa pérennité et revenir à la normale », plaidait alors l’organisation.
Le 21 février, une rencontre de la Table technique Saumon a eu lieu, à l’initiative du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs.
Plusieurs intervenants et spécialistes se sont rassemblés pour dresser un portrait des enjeux de mortalité en mer et des actions à mettre en œuvre dans les prochains mois. Les problèmes ont commencé en 2023. Une diminution drastique du nombre de madeleineaux a alerté les biologistes. Il s’agit des saumons de moins de 63 cm ayant passé un an en mer. L’année suivante, la situation s’est répétée, voire aggravée, mais en plus, les grands saumons ont aussi vu leur nombre diminuer. Ceux qui passent au moins deux ans en mer ont connu une réduction de l’ordre de 20 à 80 %, selon des données préliminaires fournies par les gestionnaires de rivières. Le bilan printanier du ministère de l’Environnement permettra d’obtenir des données plus précises sur ce déclin anticipé.

©Photo Archives
Les conditions de température des rivières figurent parmi les éléments à surveiller.
« Suite à l’analyse de plusieurs recherches, dont celles issues de projets en télémétrie, le constat est clair : les cohortes de saumoneaux qui ont fait leur migration à l’été 2022 et 2023 ont vécu une mortalité soudaine et importante, vraisemblablement dans le golfe du Saint-Laurent, probablement un peu avant ou près du Détroit de Belle-Isle, explique la FQSA. Cela signifie aussi qu’en 2025, tout porte à croire que la montaison de grands saumons sera encore une fois très en deçà de la normale. »
Quant aux madeleineaux, il est encore trop tôt pour savoir s’ils seront nombreux cette année. Les experts ont mis en lumière quelques pistes d’explications, lors de la rencontre. Les changements de températures de l’eau dans la région du Golfe et de l’Atlantique Nord, ainsi que dans l’abondance des proies et des prédateurs en font partie. L’hypothèse de la présence de maladies virales entraînée par le passage de saumoneaux près des cages d’aquaculture présentes du côté des provinces maritimes a aussi été explorée.
Les conditions de température des rivières figurent aussi parmi les éléments à surveiller. Il en va de même pour celle d’une augmentation des prises accidentelles par les pêches aux poissons de fourrages (hareng, capelan).
« Considérant l’ampleur de l’enjeu et les conséquences pour le saumon atlantique, la FQSA demande au MPO d’agir rapidement pour mettre des observateurs sur les bateaux de pêches commerciales susceptibles de prendre accidentellement des saumoneaux, afin de documenter la situation, en plus de limiter fortement ces pêches pendant les quelques jours critiques où passent la vaste majorité des saumoneaux dans le Golfe jusqu’à l’est du détroit de Belle-Isle », demande la Fédération.
Au Québec, la FQSA note qu’il est trop tôt pour exiger une fermeture des pêches récréatives et traditionnelles. Des consultations sont en cours auprès du ministère de l’Environnement, mais « les modalités de pêche récréative seront vraisemblablement plus axées vers la remise à l’eau intégrale », indique-t-elle.
Ottawa lance son plan
Jeudi, dans ce qui devait être la ou l’une de ses dernières annonces comme ministre fédérale des Pêches, Diane Lebouthillier a annoncé la toute première stratégie de conservation du Canada visant à rétablir et à reconstituer les populations de saumon sauvage de l'Atlantique et leurs habitats.
Celle-ci comprend quatre résultats stratégiques : soutenir des populations de saumon saines et résilientes aux changements climatiques, assurer l'harmonisation avec les droits des Autochtones, promouvoir une communauté scientifique du saumon dynamique et bien informée, et recourir à des pratiques de gestion transparentes et bien informées. Une enveloppe de 1 million de dollars sera attribuée pour appuyer de nouveaux projets en ce sens. Un processus d’appel de propositions sera lancé au cours des prochains mois. Des sommes de 6,1 millions ont déjà été investies.

©Jean-Philippe Thibault - Gaspésie Nouvelles
La députée et ministre, Diane Lebouthillier.
« Ayant grandi en Gaspésie, je comprends que le saumon de l'Atlantique fait partie intégrante du patrimoine et de l'histoire du Canada, explique Diane Lebouthillier […] En toute collaboration avec les communautés autochtones, les partenaires et les intervenants, nous pouvons parvenir à assurer un avenir sain et prospère au saumon de l’Atlantique. »
Cette annonce a été accueillie favorablement par la Fédération du saumon de l’Atlantique et son président-directeur général, Louie Porta, qui y voit un premier pas dans la bonne direction. « Nous reconnaissons que le financement d’aujourd’hui est un acompte important qui fera toute une différence sur le terrain en 2025, et qui ouvrira la voie à un investissement substantiel indispensable dans les années à venir. »
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