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Retour25 février 2020
Barrage ferroviaire à Listuguj: Québec obtient une injonction
©Photo Chaleurs Nouvelles - Roxanne Langlois
Du bois trônait notamment sur le rail en début de journée, mardi ; les manifestants l'ont dégagé en après-midi, désirant ainsi démontrer leur bonne foi.
TRANSPORT. Le blocage du chemin de fer gaspésien par des membres de la communauté de Listuguj en serait-il à ses derniers balbutiements? Le gouvernement provincial, propriétaire du rail, a du moins obtenu une injonction, plus tôt aujourd’hui, lui conférant officiellement le droit de libérer les rails si les manifestants ne le font pas eux-mêmes.
La demande, signifiée par Transports Québec à 14h au palais de justice de Québec, a été accueillie par le juge de la cour supérieure Paul Corriveau. Initiée par l’avocat du gouvernement, Me Alexandre Ouellet, l’injonction est en vigueur jusqu’au 5 mars à 23h59.
L’injonction ordonne aux responsables du blocus de « déplacer immédiatement toute structure ou toute autre forme d’entrave bloquant ou restreignant la libre circulation sur la voie ferroviaire appartenant au gouvernement du Québec » et de s’abstenir de nuire au passage des trains.
Ceux-ci doivent aussi éviter d’entraver l’enlèvement de tout objet du rail, Québec ayant désormais le droit de les déplacer. Les agents de la paix sont ainsi autorisés à prendre les moyens, « y compris la force nécessaire », pour prêter assistance dans l’application de l’ordre du tribunal.
Quatre clients de la SCFG seraient actuellement lésés par la situation qui perdure en Gaspésie, en plus de la SCFG : LM Wind Power de Gaspé, Ciment McInnis de Port-Daniel-Gascons, Temrex Produits Forestiers de Nouvelle et Papiers White Birch de Rivière-du-Loup.
Si des policiers du service de police de Listuguj se sont déplacés en après-midi sur les lieux du camp de fortune érigé le 10 février dernier par les manifestants, la Sûreté du Québec (SQ) s’est toutefois faite très discrète; plusieurs autopatrouilles du corps policier ont néanmoins été aperçues sur le territoire de la communauté autochtone ainsi que dans la municipalité voisine, Pointe-à-la-Croix.
Précisons qu’une résolution a été adoptée par une majorité de conseillers du conseil de bande de Listuguj le 14 janvier suite à la participation, par la SQ, à une perquisition de stupéfiants sur le territoire de la réserve deux jours plus tôt ; le document cite qu’elle ne sera plus la bienvenue sur le territoire de Listuguj sans avoir préalablement obtenu l’aval du conseil de bande et du chef de la Première Nation, à moins d’un cas d’extrême urgence.
©Photo Chaleurs Nouvelles - Roxanne Langlois
Des policiers de Listuguj se sont présentés sur place en après-midi.
Un geste de bonne foi
Des représentants de la SCFG se sont présentés sur place en fin d’après-midi et ont pu effectuer une inspection du rail. Les manifestants avaient tout juste avant dégagé la voie ferrée du bois et de d’autres objets qui s’y trouvaient. Pour eux, il s’agissait d’un geste de bonne foi.
« Ce n’est pas parce qu’on arrête, on veut juste montrer plus de paix », résume l’un des manifestants, Austin Caplin. Les participants au blocus refusaient encore de laisser passer les trains au moment d’écrire ces lignes. « On ne veut pas rester ici trop longtemps, mais on est prêts à rester ici le plus longtemps possible », ajoute le manifestant qui n’a pas voulu commenter l’éventualité d’une intervention policière sur les lieux de la barricade.
©Photo Chaleurs Nouvelles - Roxanne Langlois
Le chef héréditaire du Grand conseil micmac de la Gaspésie, Gary Metallic.
Rappelons que les membres de la communauté qui se relaient au campement agissent en soutien aux chefs héréditaires de la communauté autochtone Wet'suwet'en de la Colombie-Britannique, qui s’opposent au projet de gazoduc Coastal GasLink sur leurs terres ancestrales. Selon Austin Caplin, les membres de Listuguj comptent rester sur place jusqu’à ce que ce projet avorte.
Le Chaleurs Nouvelles a eu l’occasion, en matinée mardi, de s’entretenir avec le chef héréditaire du Grand conseil micmac de la Gaspésie, Gary Metallic. Celui-ci a mentionné que les manifestants avaient rencontré certain des chefs traditionnels des sept districts micmacs originaux. « Ils ont le support plein et entier de Gespe’gewa’gi aussi longtemps que le tout se déroulera pacifiquement », a expliqué son chef. Gespe’gewa’gi est le septième district du Mi’gma’gi, le territoire ancestral des Micmacs.
La SCFG en attente
Le directeur général de la SCFG, Luc Lévesque, était du groupe de travailleurs qui s’est déplacé au campement pour constater l’état des lieux. « On va envoyer (un train) si on peut en envoyer un, c’est sûr et certain, mais si le blocus se poursuit, on va laisser le gouvernement poursuivre ses démarches », explique M. Lévesque.
La SCFG avait reçu des informations, en après-midi, à l’effet que le barrage était sur le point d’être levé, ce qui n’était pas encore le cas en fin de journée ; des manifestants s’apprêtaient d’ailleurs à encore une fois passer la nuit sur place.
« Ce n’est pas nous qui allons forcer (quoique ce soit). Nous, on n’est que l’exploitant, on opère des trains. C’est sûr qu’on a vraiment hâte de passer parce que c’est en train de causer de gros préjudices à la Société de chemin de fer de la Gaspésie. On est en train de scrapper des années d’ouvrage », plaide le gestionnaire.
La SCFG a déjà évalué à environ 15 000 $ ses pertes financières quotidiennes depuis le début du conflit, qui a cours depuis 16 jours à Listuguj. Un convoi de 72 wagons transportant 48 pales d’éoliennes produites chez LM Wind Power de Gaspé a dû être annulé et devait quant à lui rapporter 100 000 $ à l’organisme à but non lucratif. Celui-ci a d’ailleurs mis temporairement à pied 15 de ses 34 employés le 21 février dernier.
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Le directeur général de la SCFG, Luc Lévesque.
Les médias ont tous été expulsés, cet après-midi, du lieu où se massaient de nombreuses personnes et plusieurs véhicules. Seule une journaliste de Radio-Canada, Isabelle Larose, a reçu l’autorisation de demeurer sur place. Les autres n’ont pu, pendant un certain temps, s’avancer plus loin que l’intersection de la 132 et du chemin Qospem, menant au chemin de fer.
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